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Le Genévrier et la Société Botanique de Liège.

Le Genévrier et la Société de Botanique de Liège s’associent pour offrir à leurs membres des activités et des publications complémentaires.
Si vous avez déjà versé la cotisation du Genévrier, vous pouvez verser le complément de 25€ en mentionnant qu’il s’agit d’une affiliation complémentaire à la Société de Botanique de Liège.

SOCIÉTE BOTANIQUE DE LIÈGE asbl
Université de Liège (Campus du Sart Tilman) Institut de Botanique B22
Chemin de la Vallée, 4 B-4000 LIÈGE
Tél. : 04.366.38.81

Prochaines activités programmées pour 2024

Samedi 24 février : excursion hivernale d’une demi-journée dans la vallée de la Solières, près de Beaufort (Huy).

Rendez-vous à 13 h 30 au parking, situé rue de la Poudrerie, auquel on accède près de la brasserie « L’Elysée Beaufort », avenue de Beaufort, 71 à 4500 Ben-Ahin, Huy.

Guide : Francis Dechany. Gsm : 0486/276510.

Lundi 15 avril : séance de détermination mycologique à l’Observatoire du Monde des plantes (à 500 m à l’est du bâtiment B22 et de l’arrêt Botanique-Vétérinaires du bus 48), en direction de Colonster, Quartier Vallée 3, Chemin de le Ferme, 1 au Sart-Tilman, 4000 Liège (Parking 76).

Rendez-vous dès 18 h 30 avec votre récolte.

Animateur : Philippe Voss. Gsm : 0478/922305.

Samedi 27 avril : excursion printanière d’une demi-journée, près de Hallembaye (commune d’Oupeye).

Rendez-vous à 13 h 30 au parking du Lidl, Avenue de Froidmont 47 (N671) à 4684 Oupeye.

Guide : Philippe Voss. Gsm : 0478/922305.

SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE LIÈGE asbl
Université de Liège (Campus du Sart Tilman) 
Institut de Botanique B22 
Chemin de la Vallée, 4 
B-4000 LIÈGE
Tél. : +32 (0)4/366.38.81
Banque : IBAN BE54 0000 6249 7197 – BIC GEBABEBB
N° d’entreprise : 0410082841

Édito trimestriel 2019/2

Mal Identifié, PAS respecté !   par Jacques STEIN

Pouvoir préciser la nature du vivant, son type, sa catégorie, pouvoir dire ce que c’est, le nommer, c’est aussi l’identifier.Avoir de la considération pour le vivant, ne pas lui porter atteinte, c’est aussi le respecter.
L’un ne va sans doute pas sans l’autre…
Comment respecter quelqu’un qu’on traite de réfugié, de migrant, de SDF, … en niant son identité personnelle, ses qualités, ses compétences, son histoire, … ?
Comment respecter la Biodiversité si on se contente d’injecter de temps à autre le mot dans un discours parfois bien chargé de bonne conscience, ou en le remplaçant par d’autres termes soi-disant plus faciles à comprendre par le brave peuple.
Ce qu’il faut évidemment, c’est faire apparaître la Biodiversité là où cela peut avoir un réel impact sur son identification et dès lors sur son respect, sa meilleure prise en compte et prise en charge.

Les mauvais exemples… Il y a peu, le Conseil Supérieur Wallon de la Conservation de la Nature, à l’intitulé sans doute trop prestigieux, a été supprimé au profit d’une section Nature au sein d’un pôle ruralité. ça fait moderne sans doute, mais ça rend invisible… Pourquoi pas un pôle Biodiversité ?

On a déjà eu l’occasion par le passé de préciser les différents termes qui gravitent autour de la Biodiversité. La Biodiversité : c’est le vivant. La Nature : c’est le vivant et le non-vivant résultant de phénomènes naturels, c’est-à-dire largement hors de portée de l’homme : l’eau, le sol, les roches, le climat, les océans, … qui ont été constitués au fil de l’évolution de la planète et donc bien avant que l’homme ne viennent mettre tout cela manifestement en péril (voir à ce sujet le rapport de l’IPBES[1]). Et il y a bien sûr de la biodiversité dans l’eau, dans le sol, dans les roches, dans l’océan, …mais on y observe aussi des pratiques parfois très intensives : l’agriculture, la sylviculture, la chasse, la pêche, l’exploitation des roches et des minéraux précieux (pour l’homme !), le tourisme de masse, … Et là, la réglementation « Nature » n’a pas droit de regard… Car si la vénérable loi sur la Conservation de la Nature (1973) « tend à  sauvegarder le caractère, la diversité et l’intégrité de l’environnement naturel par des mesures de protection de la flore et de la faune, de leurs communautés et de leurs habitats, ainsi que du sol, du sous-sol, des eaux et de l’air, elle ne vise pas à  réglementer l’exploitation agricole et forestière », ni la chasse, la pêche, l’exploitation des ressources minières ou le tourisme, qui ont leurs propres réglementations « verticales ».

En 2001, lors de la plus importante modification de la loi de 1973, le décret du 06 décembre aurait pu être intitulé « Décret sur la Biodiversité », remettant ainsi les pendules à l’heure. On lui a préféré un « Décret Natura 2000 ». À une « Stratégie sur la Biodiversité », qu’on fait, défait et refait depuis près de 40 ans, on préfère un « Réseau Wallonie Nature ». Dans les priorités du Conseil économique, social et (récemment) environnemental de Wallonie, la Biodiversité est noyée dans une « Stratégie globale pour la ruralité ». Dans le rapport sur l’état de l’environnement wallon de 2017, pourquoi le chapitre « Faune, flore et habitats » n’est-il pas le chapitre « Biodiversité » ? En matière d’éducation, et tout en étant conscient qu’il ne se passe rien ou si peu dans le secteur scolaire, on est à nouveau dans la même configuration…  . L’éducation à la Nature a été rangée au fond d’un tiroir de l’ErE (Éducation relative à l’Environnement) censée tout couvrir… Etc., etc., …

La situation est d’autant moins visible que, 9 fois sur 10, le ministre wallon de l’environnement n’est pas le même que le ministre de la Nature, matière qui regroupe également les forêts, la chasse, la pêche, dont les lobbyings sont largement plus puissants que celui (s’il existe) de la Biodiversité. Les budgets respectifs en disent sans doute long à cet égard.

Tout cela explique en grande partie pourquoi le grand public ne voit pas trop bien de quoi il s’agit quand on lui parle de Biodiversité. Il ne peut pas se référer à une législation explicitement consacrée à la Biodiversité, ni à une administration spécifiquement consacrée à la Biodiversité, ni à une éducation orientée vers la Biodiversité, ni à des documents sur le sujet, ni, ni …

Et donc : mal identifié, mal connu, mal évalué, mal respecté… Chiens courant en liberté « hors-pistes » dans les bois et les réserves naturelles, circulation sur les chemins non carrossables avec des engins motorisés, dispersion de groupes hors des sentiers prévus, certains photographes sans foi ni loi, … au détriment des nidifications au sol, des périodes de reproduction, des naissances, de la tranquillité lors des extrêmes climatiques, …, lâchage dans la Nature d’animaux exotiques devenus encombrants, braconnage (notamment de batraciens protégés), pêche sauvage, dépôts de déchets (notamment de jardin), … mais aussi surexploitation et intensification de toute nature, gestion calamiteuse des espaces verts autoroutiers, pollution lumineuse, barrage, … Le tout sans le moindre égard pour le vivant avec lequel nous co-évoluons et dont nous sommes pourtant totalement dépendants, qu’on le veuille ou non.

Ce qui manque à l’évidence à la Wallonie, c’est une plateforme régionale de coordination en matière de Biodiversité, dotée de moyens qui la rendent visible et efficace. C’est la recherche d’une lisibilité institutionnelle de la Biodiversité. C’est une stratégie pour stopper la perte de Biodiversité. C’est une gestion beaucoup plus patrimoniale du vivant. C’est une revalorisation de la fonction consultative en matière de Biodiversité. C’est la mise en place d’un accord-cadre de recherche et de vulgarisation en matière de Biodiversité, selon un plan quinquennal. C’est une reconnaissance du travail des associations œuvrant à la reconquête de la Biodiversité et des Paysages et une augmentation en rapport des moyens qui leur sont octroyés.

[1] https://www.ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr

Édito trimestriel 2019/1

Mais qu’est-ce qui et qui est-ce qui font courir les gens… ? Et pourquoi ?
Jacques STEIN

Par milliards : finale 2018 de la Coupe du Monde de Football, Live AID en 1985, …
Par millions : certaines messes du Pape, les « marches républicaines » de 2015 en France, …
Par centaines de milliers : certains concerts live de stars du Rock (ou leur enterrement…), le dernier Salon de l’Auto, la « Marche blanche », les « gilets jaunes », le Festival de Dour, certains écrivains, …
Par dizaines de milliers : la marche verte pour le climat (les grands-parents, les dimanches et les jeudis des étudiants), une finale de la Coupe de Belgique de foot, la Gay Pride de Tel-Aviv de 2011 ou celle d’Anvers en 2018, la COP 21 Climat à Paris, COP Biodiversité 2010, …
Par milliers : COP Ramsar sur les zones humides d’importance internationale, COP Climat et Biodiversité, Journées du Patrimoine en Wallonie, marche ADEPS, quelques populistes et autres dictateurs de république bananière, Marche contre les pesticides, …
Par centaines : le lancement des ateliers de la Biodiversité en Wallonie, le Festival de la Philosophie, …
Par dizaines : les activités du Genévrier ☹ …

Alors pourquoi ? Pourquoi tant de monde pour certains événements et si peu pour d’autres ? Le fanatisme ? La recherche de ce qu’on ne sera jamais ? La peur de l’au-delà ? La peur du lendemain ? La peur de l’autre ? La peur tout court ? Le rêve ? L’émotion, la tristesse ? La hausse des prix du carburant ? L’espoir de lendemains meilleurs ? La peur du basculement environnemental ? La recherche d’identité ? L’envie de connaître ? …

Ce n’est en tout cas pas les questions environnementales qui remportent la palme du succès de foule. Certes les marches récentes pour le climat ont attiré du monde.

Subitement quand même…

Le 08 septembre 2018 en France, à la suite de la démission de Nicolas HULOT.

Le 02 décembre 2018 à Bruxelles à l’appel de la Coalition Climat regroupant plus de 70 ONG et autres organisations – « Claim the Climate ».

Alors que la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques a été signée durant le premier « Sommet de la Terre » à Rio, en 1992, soit il y a plus de 25 ans… Et que, depuis plus de 30 ans, le GIEC[1] n’a pas ménagé ses efforts pour médiatiser les problèmes aujourd’hui sur toutes les lèvres.

Évidemment, la cacophonie pathétique de la Belgique en matière de climat au niveau européen notamment a peut-être servi de catalyseur.

Mais, pour revenir à l’ADN du Genévrier, pourquoi les problèmes tout aussi cruciaux liés à l’érosion de la Biodiversité, des espèces, des ressources génétiques, des processus écologiques, mis en évidence également en 1992 à Rio avec la signature de la Convention sur la Diversité Biologique et provoquant la création en 2012 de l’IPBES[2], ne tiennent-ils pas eux aussi le haut du pavé ? Les citoyens vont-ils aussi attendre encore 25 ans avant de se réveiller ? Ou bien pensent-ils qu’une loi sur le climat va régler tous les problèmes ? Ce qui est illusoire vu l’inertie des processus qui, même si on faisait tout bien dès cette minute, continueraient à évoluer négativement encore durant pas mal de temps avant d’être stabilisés. Et sachant qu’il y a bien d’autres causes non résolues qui augmentent la vitesse de la dégradation de la Biodiversité : urbanisation et bétonnage en tous genres, fragmentation des habitats et des populations d’espèces, surexploitation des ressources et des richesses naturelles, prolifération d’espèces exotiques envahissantes, dégradation chimique et physique du milieu, notamment des sols, …

Ou alors est-ce plus facile de s’occuper du climat que de la Biodiversité ?

Les changements du climat, et surtout leurs manifestations extrêmes (de -50° C d’un côté de la planète à +50° C de l’autre cet hiver) se voient au jour le jour même si c’est parfois loin d’ici. Quoique… l’augmentation insidieuse de la température moyenne est plus discrète et plus difficile à concrétiser, …  sauf sur l’évolution de la Biodiversité qui ne dispose pas de tous nos artifices pour s’adapter.

Quant à la Biodiversité, il paraît que ce néologisme, réunissant pourtant dans un souci de facilité un nom commun et un adjectif, parfaitement bien connus (diversité et biologique), est difficile à comprendre. On confond avec le Bio dont tout le monde parle (et qui n’a en effet rien à voir avec la problématique de la Biodiversité), ou bien : « c’est trop scientifique », « c’est trop compliqué », …

Pourtant certains scientifiques qui parlent du climat ont la cote : Hubert REEVES, Stephen HAWKING (décédé en 2018) ou Aurélien BARRAU, … Ils ont toutefois un point commun : ce sont des astrophysiciens. Ils s’occupent au quotidien de choses qui dépassent encore plus notre entendement : l’univers, les galaxies, les milliards d’années-lumière, les trous noirs, … Ce qui contribue peut-être à leur succès. Ils en profitent bien sûr pour aussi parler de Biodiversité, mais sans que cela provoque des marées humaines dans les rues. Peut-être n’y a-t-il pas assez de scientifiques suffisamment charismatiques pour faire passer le message alarmant de la situation de la Biodiversité.

Car effectivement, la Biodiversité, ça semble plus complexe que la météo. Il faut faire un effort personnel pour avaler l’idée, largement répandue par les médias ces moments-ci, que plus de 40 % des insectes pourraient disparaître d’ici la fin du siècle[3] à cause de l’agriculture intensive, de l’urbanisation et de la pollution chimique de notre environnement. « Si nous ne modifions pas notre manière de produire notre nourriture, tous les insectes prendront le chemin de l’extinction. Les répercussions sur les écosystèmes seront catastrophiques », concluent les scientifiques. 75 à 80 % des plantes cultivées pour notre alimentation dépendent des pollinisateurs, pour ne citer que ceux-là. Mais aussi : 60 % des oiseaux se nourrissent d’insectes, ce qui explique en partie leur déclin sur une vaste échelle. Ainsi en Wallonie, on constate que les espèces migratrices, toutes insectivores déclinent fortement depuis près de 20 ans. MAIS ça NE SE VOIT guère ! Le problème des poissons, au fond de l’eau : ça ne se voit pas ! La disparition des plantes sauvages : ça ne se voit pas non plus ! La disparition des petits mammifères insectivores (hérissons, chauves-souris,) ça se voit peu ! La raréfaction des espèces nocturnes, ça ne se voit pas davantage !  Ce qu’on voit, ce sont les mammifères accidentés : les blaireaux, les renards, … C’est la prolifération des espèces opportunistes, peu éclectiques ou envahissantes : les bernaches, les ouettes d’Egypte, les corneilles, les pigeons, les mouettes et autres goélands, la berce du Caucase, la balsamine de l’Himalaya, la renouée du Japon, les coccinelles asiatiques… Et à la limite ce sont des espèces agréables à regarder ! Mais ça ne fait pas descendre les gens dans la rue. On ne voit pas que le vivant est en crise. Et on ne « sent » pas l’effondrement (collapse) de la Nature qui se dessine à plus ou moins court terme si on persévère dans la mauvaise voie. On ne voit pas que l’ensemble de ces espèces et de leur diversité, concourt au bon fonctionnement des processus du vivant, … dont nous dépendons quasi complètement au quotidien.

Qu’est-ce qui arriverait si ces services dits écosystémiques (et assurés gratos par le vivant) continuaient à se dégrader ? On pourrait avoir des soucis dans les secteurs suivants de notre quotidien : perturbations au niveau des ressources alimentaires issues de l’agriculture, de la pêche, de la chasse et de la cueillette, mais aussi au niveau des ressources en matériau, bois, fibres animales et végétales (laine, lin, chanvre…), matière organique, au niveau des ressources génétiques, médicinales et pharmaceutiques, des eaux, de surface et souterraine, à usage domestique, agricole ou industriel, des biocarburants et du bois de chauffage, de l’autoépuration des sols, de la purification et de l’oxygénation de l’eau, de la capture des polluants de l’air, de l’atténuation du bruit et des impacts visuels, de la protection contre les inondations, les tempêtes et l’érosion, du maintien du cycle hydrologique et des flux d’eau, du contrôle des feux, de la pollinisation, de la dispersion des graines, du maintien des habitats, de la lutte biologique, de la régulation des infections, des processus d’altération, de décomposition, de minéralisation et de fixation des sols, de la régulation du climat local, régional et global par séquestration des gaz à effet de serre, des lieux de vie, de travail, d’étude,  des activités quotidiennes de plein air, des loisirs en plein air (balades, pêche, récolte de champignons…), de l’observation de la nature, de l’éducation et de la recherche scientifique, des valeurs patrimoniales, sentimentales, symboliques, culturelles, sacrées, religieuses ou d’existence, …

Un petit exemple qui ne mange pas de pain pour illustrer le propos : la litière en forêt feuillue que tout le monde connaît ! Ses tapis de feuilles mortes en automne, qui rendent les promenades tellement plus agréables et que les gosses ont bon de faire voler dans les airs en trainant les pieds… Mais ce n’est pas que cela. Le poids de ces retombées automnales peut atteindre 2 à 4 tonnes (!) à l’hectare, constitué de feuilles (80%), de rameaux, de branches, d’écorces, auquel il faut ajouter le poids des fanes des couvertures herbacées et muscinales (les mousses). À cela, il convient d’ajouter en outre les champignons et la faune qui séjournent dans la litière. Là encore, on avoisine les 2 tonnes de matière vivante par hectare de litière : protozoaires, nématodes, acariens, collemboles, enchytréides, lombrics, larves de diptères, de coléoptères, de lépidoptères, coléoptères adultes, fourmis, myriapodes, cloportes, araignées, limaces, escargots, …  Ces organismes non végétaux ne sont pas là par hasard : ils ont une action tour à tour physique ou chimique. Certaines espèces découpent les feuilles fanées en fragments de plus en plus petits de manière à faciliter la dégradation chimique ultérieure par les champignons, les bactéries, les protozoaires, … Ils s’attaquent aussi bien sûr au bois et aux cadavres d’animaux qu’ils décomposent de la même façon. Tout cela pour transformer ces matières organiques parfois très complexes (la lignine du bois par exemple) en éléments de plus en plus simples susceptibles d’être exploités par les racines des plantes dès le renouveau printanier… Ce qui a pour effet de faire disparaître la litière au fil du temps plus ou moins rapidement en fonction des conditions du milieu et des matériaux à transformer. Dans une aulnaie par exemple, dont la litière est riche en azote, la décomposition peut être bouclée en une saison. Dans une hêtraie ardennaise, dont la litière est plus « coriace » et le sol est plus acide et moins biodiversifié, la transformation d’une retombée automnale donnée peut s’étaler sur plusieurs saisons… et les retombées suivantes vont donc pour une bonne part s’accumuler.

Donc, si par un tour de passe-passe on éliminait toute la fonge (les champignons) et toute la microfaune du sol, la litière n’en finirait pas de s’accumuler indéfiniment jusqu’à atteindre des hauteurs inimaginables…rendant le milieu totalement impraticable. ET ça SI ça DEVAIT ARRIVER ça SE VERRAIT. Voilà donc à quoi servent ces services écosystémiques actuellement en perdition et dont nous dépendons pour notre survie. Vaudrait peut-être mieux prendre les devants… Non ?

D’autant qu’on connaît mieux maintenant la recette pour mettre les décideurs au pied du mur. Ainsi pour le climat, après des années et des années d’inaction, et à quelques encablures d’une élection européenne, fédérale et régionale, vous prenez une marche dominicale citoyenne de 75.000 participants qui revendiquent la justice climatique et des actions en faveur du climat, vous ajoutez un soupçon de collégienne suédoise militante de 15 ans (Greta Thunberg) qui décide courageusement (et efficacement) de faire la grève de l’école pour le climat ; vous lancez ensuite, tous les jeudis matin, des dizaines de milliers d’étudiants dans les rues des grandes villes. Enfin, vous agitez le tout sous le regard des médias jusqu’à ce que les élus, les partis politiques, les ministres responsables, …  décident enfin de se bouger !

Et ça marche ! Une étude scientifique commandée fin 2018 (mieux vaut tard que jamais !) est transformée en projet de Loi-Climat dont tous revendiquent la paternité ou la maternité. Les états-majors des Partis se réveillent. « L’environnement doit irriguer systématiquement l’action de notre parti » disent les uns. « Voici nos 30 propositions pour le climat » rétorquent d’autres. « Rappelons nos luttes contre les autoroutes dans la ville et les nuisances des avions » soulignent d’autres encore. « Taxons les multinationales sur les émissions de CO2 » revendiquent les suivants. « Pourquoi pas un débat ? » lancent les derniers… Sans compter les transports en commun gratuits, comme à Hasselt par ailleurs il y a 25 ans déjà, les voitures de société vertes et l’achat groupé en Flandre de voitures électriques…. Jusqu’au F.R.S. -FNRS (Fonds de la Recherche Scientifique) qui se mobilise concrètement pour le climat : 20 millions d’euros pour lutter contre le réchauffement climatique… Mieux vaut tard que jamais ! Bref ça part dans tous les sens comme toujours quand il y a un problème sérieux et complexe que les décideurs n’arrivent pas à résoudre.

Tous s’y mettent donc, à l’exception bien sûr des climato-réalistes qui n’ont pas encore réalisé qu’il y avait un problème et n’ont pas encore mesuré toute l’acuité de la situation. Évidemment tout ça n’est encore que du bla-bla. Car il y a la complexité institutionnelle, les intérêts divergents, les tergiversations, la procrastination habituelle, … Le projet de Loi-Climat résume tellement bien tout cela !

Donc :  Wait and see !

Et justement ! En attendant, la Biodiversité ne profite même pas de cet engouement, de cette prise de conscience et de ce bla-bla. Il n’est jamais trop tard évidemment mais il est temps que les marches et démarches « Pour le climat » deviennent désormais explicitement des événements « Pour le climat et la biodiversité » …

 

[1] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

[2] Le GIEC de la Biodiversité : The Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services. Ou en Français : Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques.

[3] Francisco Sánchez-Bayoa, Kris A.G. Wyckhuysb, 2019 – Worldwide decline of the entomofauna: A review of its drivers. Biological Conservation, 232, 8-27.

Mais où est donc passée la Biodiversité ? Éditorial trimestriel 04-18 par Jacques STEIN.

On le sait bien sûr ! Là où elle conserve toujours ses caractères taxonomique, génétique et fonctionnel, on la trouvera dans les « Hotspots » de la Biodiversité, comme l’Amazonie (du moins tant que les nouveaux gouvernants ne l’ont pas saccagée irrémédiablement). Dans nos contrées, vu les petits espaces qui lui sont dédiés, seuls les aspects taxonomique et génétique peuvent être mis en exergue ; mais, fonctionnellement, c’est largement insuffisant, l’espace étant bien trop fragmenté pour un fonctionnement global efficace de notre environnement naturel…
Soit ! Mais c’est plutôt au niveau des programmes préélectoraux (communal récemment passé et régional et/ou fédéral et/ou européen à venir) que la question mérite d’être posée.
Car, quand le thème est évoqué, c’est rarement dans le top 10 des préoccupations des candidats ou alors c’est en termes très généraux, sans actions concrètes et efficientes très « contraignantes » pour la législature à venir.
On verra plus tard, quand les autres problèmes auront été réglés, et s’il reste des sous !
Comme on fait pour le climat ! Cela fait 30 ans que le G.I.E.C. propose des actions, des limites à ne pas franchir, des évaluations des retombées sociales, économiques et environnementales, des estimations des coûts de l’inaction  (plus on tergiverse, plus ça coûte) … Résultat : il n’y a jamais eu autant de rejets de CO2 dans l’atmosphère… et de gilets jaunes dans les rues. Ça peut se comprendre : quand on taxe les combustibles fossiles pour protéger la planète et que, simultanément, on abat des milliers d’arbres le long des autoroutes, des routes et dans les parcs publics, les faisant ainsi passer du statut de « puits de carbone » à celui de gaz à effet de serre…Comment s’y retrouver ? On aurait par ailleurs tort de penser que le problème du climat une fois réglé, on peut la jouer cool vis-à-vis de la Biodiversité. Il y a certes des liens entre changement climatique et Biodiversité, mais pas que. La crise de la Biodiversité est aussi liée à l’urbanisation, à la surexploitation des ressources, aux espèces exotiques envahissantes, à la fragmentation de l’espace, à la disparition des habitats favorables à la Biodiversité, …
La COP 24 Climat, en Pologne, a d’ailleurs envoyé aux oubliettes les résultats de la COP 14 Biodiversité qui se terminait en Egypte (sans tambours ni trompettes) au moment même où commençait la COP Climat. Certes les deux ont été laminées à leur tour par le Pacte de l’ONU sur la migration ou du moins par ses conséquences sur la célèbre musculation préélectorale belgo-belge… Peut-être qu’une grande marche citoyenne pour la Biodiversité… ??
Bref, en Belgique, la loi sur la Conservation de la Nature a été adoptée en 1973, soit il y a 45 ans. Avec un élément phare depuis le début : la création de réserves naturelles. Il y a aujourd’hui 9.819,29 ha de Réserves Naturelles Domaniales en Wallonie, soit la création en moyenne de 218 hectares par an, soit 0,01 % du territoire par an en moyenne. Si on cumule tous les statuts de protection actuels (et en ne tenant pas compte de certaines lasagnes de statuts qui encombrent un même site), le principal instrument de conservation de la Nature en Wallonie couvre donc au grand maximum : 236.124,8 hectares ou 14% du territoire wallon, dans des espaces qui sont d’ailleurs de moins en moins dévolus prioritairement à la Biodiversité. C’est le cas de nombreux sites Natura 2000 dans lesquels subsistent des exploitations agricoles et forestières classiques et de nombreuses réserves naturelles dans lesquelles, notamment, la chasse n’est plus une dérogation mais la règle générale.
À la fin de chaque législature régionale, on relance un peu la mécanique. Ainsi cette fois-ci, à 5 mois des élections, le Ministre concerné lance les Ateliers de la Biodiversité , dont l’objectif est de proposer une série de recommandations, en faveur de la nature et de la prise en compte de la biodiversité dans les politiques, les plans, les pratiques et les projets : faire un focus sur l’état de la biodiversité et des écosystèmes, partager des pratiques inspirantes, débattre des enjeux sociétaux. Des recommandations certes (les mêmes sans doute qu’en 1989 à l’occasion du Colloque Gérer la Nature ?, répétées ensuite en 1995 à l’occasion de l’Année Européenne de la Conservation de la Nature), mais toujours pas de véritables actions, … après 45 ans ! Quelle ardeur d’avance…
Cette initiative un peu précipitée, pourrait faire penser à une contre-offensive en réponse à une proposition Écolo d’organiser des Assises[1] de la Biodiversité en vue notamment d’élaborer une stratégie En fait c’est comme ça à peu près tous les 5 ans. Nos élus régionaux prennent les choses en main, puis le Ministre vient avec une proposition matamoresque balayant toutes leurs réflexions antérieures : laissez, je m’en occupe !. Et comme ces nouvelles propositions ministérielles devront être gérées par le Ministre suivant, qui estime généralement que son prédécesseur n’a pas fait ce qu’il fallait et qui met le dossier sous la pile, ou qui a d’autres préoccupations, gageons qu’elles n’aboutiront pas plus que les précédentes.[2]
Qu’on en juge : depuis 1995, de nombreux projets ont vu le jour avec tout d’abord le Plan d’Action pour la Protection de la Nature prévu dans le Plan Wallon de l’Environnement pour le Développement Durable ; il est devenu au fil du temps le projet de Plan d’Action pour la Nature (1999), puis le projet de Plan d’Action pour le Développement de la Nature (2003), puis, en 2006, le projet de Stratégie wallonne de la Biodiversité : Objectif 2010, rapidement suivi d’un projet de Plan de Progrès pour la Nature, puis d’un projet de Plan Régional pour la Biodiversité 2009-2014, rapidement transformé, à nouveau, en un Plan de Progrès pour la Nature 2010-2015. Au printemps 2011, une idée de projet intitulé Plan 100% Nature était à nouveau timidement lancée, sans aucune suite à ce jour. On appréciera notamment le va et vient entre Nature et Biodiversité dans les intitulés. Bref des projets parfois très fouillés et complets, mais manifestement très malaisés à concrétiser de façon opérationnelle. Un Réseau Wallonie Nature, sorte de catalogue d’actions possibles en faveur de la Biodiversité, a été lancé en mai 2015. Calé depuis plusieurs années à la page 153 sur 230 prévues …
Le 11 décembre 2018 (journée de lancement des Ateliers), on devrait donc réfléchir à nouveau à des recommandations autour de ce catalogue [3]. Mais, vu les nombreuses actions contradictoires sur le terrain, on n’arrive visiblement pas à sortir cette problématique de l’ornière, c’est dire aussi l’intérêt qu’on y porte en général…
En attendant, une enquête publique a été clôturée le 05 décembre 2018 sur les liaisons écologiques, éléments importants d’une stratégie de la Biodiversité, mais lancée à l’initiative du Ministre chargé de l’Aménagement du Territoire dans le contexte du Schéma de Développement Territorial.
Que nous réserve alors 2019, en dehors d’un optimisme béat et de façade, 24 ans après le premier projet de plan pour la Nature, lui aussi précédé à l’époque d’une grand-messe qui s’était déroulée à Floreffe ?
On en saura peut-être plus lors de la campagne électorale 2019 et surtout dans la déclaration de politique régionale 2019-2024 qui en résultera…
Et dans les communes ? Quelle priorité a-t-elle été donnée pour les 6 années à venir aux préoccupations relatives à la Biodiversité ?
Prenons Ferrières… au hasard. Il y avait 2 listes en présence.
La liste qui a obtenu la majorité le 14 octobre dernier propose comme actions concrètes pour l’avenir :

    • un plan d’action pour atténuer l’impact des changements climatiques (biodiversité, inondations, tourisme, …)
    • la relance de l’intérêt des habitants pour le PCDN et le renforcement du rôle du PCDN dans la sensibilisation de la population à l’accueil de la biodiversité au jardin
    • la labellisation de cimetières-nature et la végétalisation de certains espaces
    • un programme élargi de fauche tardive des bords des routes beaucoup plus strictement gérés en collaboration avec l’équipe technique du SPW
    • après l’acquisition par la commune de 2 parcelles à Wésomont destinée à agrandir la réserve naturelle, des travaux de restauration des mégaphorbiaies, l’approfondissement de la mare existante et creusement d’une nouvelle mare, clôture de l’ensemble afin de pouvoir assurer la gestion du site par du pâturage extensif (avec la collaboration de Natagriwal et des budgets du Plan de Développement Rural de Wallonie).
    • le classement ou l’acquisition de plusieurs sites possibles, comme les prairies humides jouxtant la toute prochaine école de Bosson (projet nature didactique)
    • le renforcement de la synergie d’action avec le Genévrier, expert en la matière depuis longtemps à Ferrières
    • le lancement d’autres actions « envisageables » : compléter la liste des arbres remarquables, concours pelouse fleurie, recensement hirondelles,…

Quant à la seconde liste, qui n’a pas obtenu la majorité le 14 octobre, elle prévoyait dans son chapitre 9 consacré à la ruralité, l’environnement et le tourisme :

  • de rassembler, soutenir et dynamiser les structures en place sur la commune, actives en matière de protection de la Nature et de la Biodiversité
  • de relancer et de mettre en œuvre les actions définies précédemment dans le PCDN
  • de mettre en place un comité de concertation permanent avec le Genévrier
  • d’organiser, structurer et pérenniser les journées de découverte de nos richesses et de notre patrimoine.

À chacun évidemment de juger de la pertinence des actions proposées (sans estimations budgétaires concrètes !). Quoi qu’il en soit, nous ferons régulièrement écho aux réalisations mises en œuvre à Ferrières à partir du 1er janvier prochain.

[1] Il existe chez nos voisins français, annuellement depuis 2011, des « Assises nationales de la Biodiversité ». On y retrouve de nombreux acteurs parfois « inhabituels » de la Biodiversité : les maires, rassemblés au sein de l’association des « Eco Maires », les entreprises et les grandes industries, la Caisse Nationale des Dépôts et Consignations, des organismes financiers, le Conseil Économique, Social et Environnemental, les Administrations et Agences concernées, les institutions de recherches, les associations de Protection de la Nature,… On y a discuté de l’Agence Nationale de la Biodiversité, de la mise en œuvre de la trame verte, bleue, brune, …, des espèces envahissantes, de la biodiversité des sols, de l’éducation,…  Et tous ont à cœur lors de chaque édition de venir exposer les résultats de leurs actions.

[2] On espère se tromper évidemment…

[3] « Le sillon belge » a publié un compte-rendu de cette journée sous un titre assez symptomatique (« La Wallonie réfléchit (!) à un plan pour mieux protéger la biodiversité ») et optimiste (près de 500 participants alors que la liste des inscriptions « obligatoires » affiche 170 inscrits).

Quels sont nos rapports à la Biodiversité ? Éditorial trimestriel 03-18 par Jacques STEIN.

Conscients, préoccupés, inquiets, concernés au quotidien, … mais peu informés, peu engagés et peu en contact régulier avec la Nature : voilà comment on pourrait qualifier une très large majorité de citoyens selon un tout récent sondage mené en France à l’occasion de la Fête annuelle de la Nature (Eh oui, ils ont au moins cela là-bas !)[1]. Ces caractéristiques pourraient sans aucun doute aussi être appliquées aux citoyens wallons…
Cette large majorité de citoyens pense également que la Biodiversité devrait être une véritable préoccupation gouvernementale, voire une cause nationale, et que le système éducatif ne sensibilise pas suffisamment les enfants aux enjeux de la Biodiversité et de sa préservation. Mais cette large majorité n’est toutefois membre d’aucune association de Protection de la Nature et n’a jamais participé à une balade « encadrée » par des connaisseurs de la Biodiversité…
L’enquête ne dit rien par ailleurs sur les perceptions qu’ont ces citoyens sur la Biodiversité ! Sauvage ou maîtrisée ? Herbes folles ou interventions fréquentes ? Exploitation ou plaisir des sens ? Utilitaire ou à préserver ? Un peu de tout ?
Ce qui est sûr, c’est que si les « gouvernants », à quelque niveau que ce soit, en parlent, peu en font, si ce n’est de manière très marginale. Alors que de tous les coins de la Planète déferlent des appels à en faire beaucoup plus que le train-train actuel des petites actions sans grande envergure…
Et, sans un grand engouement citoyen, la situation ne changera pas.
Donc : la situation ne changera pas !
Les gouvernants en resteront au minimum minimorum pour donner l’impression que…, mais sans plus. Face à la dégringolade (pourtant largement avérée) de la Biodiversité, ils nous présenteront de beaux bilans avec TOUT ce qu’ils ont déjà fait et TOUT ce qu’ils VOUDRAIENT faire, … du moins s’ils sont sollicités pour !
Car, malgré les rapports qui s’accumulent, les alertes venant de tous horizons, les manifestes, les points de basculement qui approchent, il n’y a toujours pas de dynamique propre à la Biodiversité, pas de plan d’action voté et appliqué, pas de stratégie vis-à-vis des espèces en danger ou des sites à mettre sous statut de protection (sites précis, échéances, moyens consacrés, …), … Bref, peu d’ambitions en général.
En conclusion : si,  pour résoudre la crise de la Biodiversité, les rapports à la Biodiversité de la grande majorité d’entre nous doivent encore être considérablement améliorés, … il serait grand temps de s’y mettre et d’y mettre les moyens qui s’imposent!

[1] https://fetedelanature.com/fil-d-infos/le-rapport-des-francais-la-nature

La Nature et Nous ! Éditorial Trimestriel 02-18 par Jacques STEIN.

La Nature et Nous !

Par Jacques STEIN.

Fin mai – début juin 2018, la Nature nous a à nouveau rappelé l’impuissance de l’Homme face à des éléments qu’il ne maîtrise absolument pas : orages violents, productions agricoles détruites par la grêle, pluies diluviennes, rivières déchaînées, coulées de boue, caves et commerces inondés, …la liste est longue !

Mais on peut ne pas rester sans rien faire quand même ! Notamment en respectant « pour du vrai » les engagements pris en matière d’impacts sur le climat (diminution des émissions du CO2 et autres GES[1], énergies renouvelables, économies d’énergie, incitation à une meilleure isolation des bâtiments, maintien des espaces boisés, mesures préventives anti-coulées de boue, reconstitution du maillage bocager, …).

En ce qui concerne la partie vivante de la Nature, la Biodiversité, il serait grand temps également de prendre sérieusement les choses en main. La débauche de Journées Mondiales ou Internationales ou Européennes de  la Biodiversité, des forêts, des espèces menacées, de la vie sauvage, des zones humides, de Natura 2000, des abeilles, … nous interpelle. Pourquoi toutes ces Journées si tout va bien ? N’est-ce pas plutôt mauvais signe ? Ou en tout cas le signe que des politiques, des stratégies doivent être mises en route au plus vite.

Certes, il faut admettre, et c’est quand même relativement nouveau dans de telles proportions, que les médias répercutent de plus en plus fréquemment les informations relatives à la Biodiversité, tant au niveau des actions positives que des rapports alarmants…

Ainsi, en mars dernier, lorsque, à la suite de la publication des Rapports de la Plateforme Intergouvernementale pour la Biodiversité et les Services Ecosystémiques (IPBES)[2], 270 scientifiques belges appellent notre Gouvernement à sauvegarder la Biodiversité.

Et il y a de quoi en effet… « Selon les évaluations, préparées par plus de 500 experts internationaux provenant de plus de 100 pays, la situation est sombre. Par exemple, l’évaluation régionale pour l’Europe et l’Asie Centrale montre que dans notre région, la population d’environ la moitié de tous les animaux et plantes marins (pour laquelle nous avons des données) a diminué au cours de la dernière décennie. Les espèces d’eau douce subissent également une pression énorme, car les rivières, les ruisseaux, les lacs et les étangs dans lesquels ils vivent sont les habitats les plus menacés en Europe et en Asie centrale. Les espèces et les écosystèmes terrestres ne sont pas épargnés : seuls 16% des habitats terrestres de l’Union européenne ont un statut de conservation favorable (sur la période 2007-2012). Depuis les années 1980, l’abondance des espèces d’oiseaux des terres agricoles a diminué de 57% en Europe occidentale et centrale, et la diversité de nos cultures agricoles a également considérablement diminué. Globalement, les plantes et les espèces animales disparaissent actuellement entre 100 et 1000 fois plus vite que le taux d’extinction naturel ; ce que certains scientifiques appellent le début de la sixième extinction de masse ».

Rappelons une fois encore que « la Biodiversité est reconnue mondialement comme la pierre angulaire des écosystèmes sains. Elle constitue la base de tous les «services» produits par la nature. Ces « services écosystémiques » nous fournissent de la nourriture et des médicaments, offrent les matières premières nécessaires à l’activité économique et à l’innovation, permettent toute une gamme d’activités de loisirs, nourrissent nos besoins spirituels et inspirent nos créations artistiques. La biodiversité offre également des services de régulation tels que la production d’oxygène dans l’atmosphère, la régulation de la qualité de l’air, la régulation du climat, la purification de l’eau, la fixation de l’azote dans nos sols et la pollinisation. De plus, la biodiversité nous rend plus résistants et résilients. Alors que la biodiversité disparaît, les écosystèmes deviennent moins résilients et tous les services qu’ils offrent disparaîtront également. La biodiversité a aussi une valeur intrinsèque : les espèces sont le produit d’un long processus évolutif, et elles ont donc le droit de continuer à exister, qu’elles soient ou non utiles à l’homme ».

On connaît les grandes causes de l’érosion de notre patrimoine de la Biodiversité : l’intensification de notre agriculture, le changement climatique, le développement urbain, la surexploitation et l’utilisation non-durable des ressources naturelles, la pollution de l’air, des terres et des eaux, le nombre croissant des espèces invasives et leur impact, etc. Tous ces facteurs étant largement interconnectés.

Pour renverser la vapeur, une série de recommandations : l’intégration plus efficace de la diversité biologique parmi un ensemble de secteurs, de politiques et d’acteurs, grâce à une sensibilisation accrue, à une définition plus claire des objectifs politiques et à une meilleure conception et utilisation des instruments politiques. Mesurer le bien-être national au-delà des indicateurs économiques actuels, et utiliser des réformes fiscales écologiques qui offrent des incitations claires à passer au développement durable. Accroître l’intégration d’un large éventail de parties prenantes dans les processus de gouvernance, ainsi que des financements adéquats provenant de sources publiques et privées afin de renforcer les capacités institutionnelles et la recherche.

Les 270 scientifiques belges concluent : « L’avenir de l’homme dépend de la biodiversité. Il est temps que nous en fassions tous la plus haute priorité ».

Bon ! Et puis ?

Il semble clair qu’il faille prendre des mesures urgentes pour la sauvegarde de la Biodiversité. Oui ! Bon ! Mais est-ce bien pour nous tout ça ?

Ben oui ! Ainsi qu’en témoigne le rapport sur l’Etat de l’Environnement wallon 2017[3], notamment son chapitre consacré à la Biodiversité.

« Sur la période 2007-2012, l’état de conservation des habitats naturels d’intérêt communautaire est considéré comme défavorable pour 88% du nombre d’habitats concernés en région biogéographique continentale (RBC) et pour 96% en région biogéographique atlantique (RBA).
En ce qui concerne les espèces, l’état de conservation est considéré comme défavorable pour 63% du nombre d’espèces concernées en RBC et pour 71% en RBA. En outre, selon les listes rouges établies pour différents groupes d’espèces, 31% des espèces animales et végétales étudiées sont menacées de disparition à l’échelle de la Wallonie et près de 9% ont déjà disparu du territoire régional selon les évaluations réalisées sur la période 2005-2010.
Chez les poissons, les reptiles, les papillons de jour et les libellules, plus de la moitié des espèces sont en situation défavorable.
 L’objectif européen de stopper le déclin de la biodiversité à l’horizon 2010 n’a donc pas été atteint en Wallonie.
En ce qui concerne l’avifaune, les populations d’oiseaux communs sont globalement en diminution sur le long terme ; les espèces des milieux agricoles sont celles qui ont montré la diminution la plus flagrante. Un nouvel indicateur fait état de l’impact croissant des changements climatiques sur les populations d’oiseaux. Parmi les autres pressions exercées sur les habitats et espèces, les plus fréquemment identifiées sont l’intensification agricole, la fragmentation et l’artificialisation des habitats, l’incidence de pollutions comme l’eutrophisation et la présence d’espèces exotiques envahissantes ». Sans parler de l’azote eutrophisant, ou des forêts (dans lesquelles on n’arrive pas à atteindre le taux de bois mort recommandé en 2008, ce qui ne semble pourtant pas si dur, ni la quantité de gros arbres ou la diversité des espèces ligneuses, ni l’équilibre forêt-gibier dont on nous rabâche les oreilles depuis des décennies, en plus des phénomènes de défoliation et de décoloration du feuillage), ou de la fragmentation des cours d’eau, …

Mais les chauves-souris wallonnes semblent aller mieux ! Tandis que les moineaux bruxellois ont disparu à raison de 95% de leurs effectifs…

Difficile d’imaginer dans ces conditions qu’on va atteindre les objectifs de la pourtant peu ambitieuse[4] Stratégie Européenne (il n’y en a pas en Wallonie) de la biodiversité pour 2020 qui vise à protéger et améliorer l’état de la biodiversité et diminuer les pressions les plus fortes.

Ce qu’il faut évidemment, c’est une vraie politique wallonne de la Biodiversité reposant sur une vraie stratégie wallonne de la Biodiversité. Pas de stratégie, pas de politique !

 

[1] Gaz à effet de serre

[2] L’IPBES est à la Biodiversité ce que le GIEC est au climat.

[3] http://etat.environnement.wallonie.be/home.html

[4] http://www.iewonline.be/Strategie-biodiversite-les-molles-ambitions-de-l-Europe

De qui se moque-t-on?

On a déjà évoqué à différentes reprises le saccage, organisé par la Direction générale opérationnelle de la Mobilité et des Voies hydrauliques du SPW, des boisements garnissant jusque là les bermes latérales ou centrales des autoroutes et autres routes à 4 bandes. Cette désintégration paysagère est manifestement poursuivie avec la bénédiction des administrations chargées des forêts, de la nature et du paysage…

 

Aujourd’hui en effet, le SPW – Mobilité  communique suite à la signature d’un protocole dénommé « Protocole d’accord inter-directions opérationnelles (DGO1, DGO3, DGO4 [1]) concernant la gestion des abords boisés des bermes centrales et latérales pour la période 2017-2020 » et dont le contexte est pompeusement présenté comme suit : « Une gestion raisonnée et durable du patrimoine paysager (sic !!) le long des routes alliant les enjeux environnementaux (re-sic !!), l’équilibre des coûts de gestion, le confort et la sécurité des usagers et des agents, stimule l’image de marque de la Wallonie et son développement économique ». Tout cela fait suite notamment à l’organisation de 2 groupes de travail « Politique globale du cycle de vie de l’arbre d’alignement » et « Politique globale du cycle de vie de plantations ligneuses en bermes et terre-pleins »…Cela laisse songeur…

 

Mais que reste-t-il donc à gérer maintenant que tout a été (et est toujours un peu partout) massacré radicalement (500 à 700 mètres par jour multipliés par plusieurs chantiers) et transformé en copeaux (100 m³ par heure et par chantier) destinés au chauffage et donc contribuant à accroître la quantité de gaz à effet de serre envoyés dans l’atmosphère ?

 

Et pourquoi cette éradication sans limite ?

 

Si on en croit la porte-parole du SPW – Mobilité : « En cas de tempête, par exemple, ils (les arbres) peuvent[2] tomber sur la chaussée et provoquer de graves accidents. Les feuilles au sol peuvent aussi rendre la route glissante ou boucher les avaloirs et provoquer de l’aquaplanage. Par ailleurs, les feuilles peuvent masquer les panneaux indicateurs et réduire l’éclairage public. Il était donc temps d’intervenir« .

 

La presse, qui souvent farfouille pour objectiver les informations qu’elle reçoit, a avalé ici toutes les couleuvres libérées par le SPW – Mobilité sans le moindre état d’âme et les a régurgitées telles quelles auprès du public sans la moindre analyse critique, réservée sans doute à des sujets plus sérieux. Combien par exemple recense-t-on d’accidents graves provoqués par les événements listés ci-avant ? Mystère ! Autant on les imagine facilement sur les routes à deux voies de circulation traversant une forêt, autant ici le danger d’accident grave est ailleurs. Notamment dans des collisions avec des animaux sauvages. Maintenant qu’il n’y a plus d’arbres, on peut se rendre compte de l’état lamentable des clôtures censées empêcher ces animaux de circuler sur la route … Des arbres de belle taille ont poussé au travers des mailles des clôtures et il serait donc en effet temps, et utile cette fois, d’intervenir à ce niveau !

 

Si les enjeux paysagers n’ont manifestement pas été pris en considération (on cherche vainement des nuances dans la gestion actuelle), les enjeux environnementaux non plus.

 

Le principal alibi environnemental réside dans le fait que ces opérations d’envergure se déroulent principalement en hiver, avant la période de nidification, pour réduire l’impact de l’abattage sur les oiseaux. On permet aux oiseaux de se reproduire, puis on élimine systématiquement tout ce qui pourrait encore ensuite leur servir de lieu de reproduction, de gite et de couvert… On sauve donc une génération, puis on hypothèque toutes les suivantes…

 

Par ailleurs on nous a suffisamment bassiné les oreilles ces dernières années avec le rôle de stockage du carbone (puits de carbone) par les arbres, pour ne pas comprendre l’impact considérable de ces opérations « d’entretien » sur le bilan wallon. Quant à leur rôle d’écran vis-à-vis des fumées, des particules, de bruit, du vent, etc…et de confort vis-à-vis des usagers (ce qui a largement été démontré par ailleurs), on n’a visiblement pas non plus cherché à approfondir la question !

 

La motivation profonde de ces « entretiens » semble donc ailleurs : renflouement des caisses de la Wallonie ? Relance de la filière du chauffage au bois en économisant les forêts gérées de façon plus durable ? Haine des arbres ? Rentabilisation de coûteuses machines ? Besoin de montrer qu’on est là ? Qu’on agit ?….

 

[1] Respectivement chargées « des routes », « des forêts et de la Nature » et de « l’aménagement du territoire et du paysage »

[2] C’est nous qui soulignons

LA NATURE : PARENT PAUVRE DU PATRIMOINE ! Éditorial Trimestriel 1-18 par Jacques STEIN

Sur proposition de la Commission Européenne, le Parlement Européen et le Conseil de l’Union Européenne ont décidé en 2016 de proclamer 2018 : « Année européenne du Patrimoine Culturel ». Nous sommes donc dedans !

L’idée consiste évidemment à diffuser et à accroître la sensibilisation et l’éducation aux valeurs du patrimoine culturel européen, se référant notamment en cela à la « Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société » adoptée à FARO (Portugal) en 2005.

On pourrait tout d’abord s’interroger sur le sens qu’il convient de donner à « la » ou « les valeurs » du Patrimoine culturel. Mais on ne le fera pas ici tant ces notions sont subjectives, polysémiques et en perpétuelle évolution…

Par contre, on peut se demander ce qu’est le « patrimoine culturel ». Selon la Convention de FARO (article 2), « le patrimoine culturel constitue un ensemble de ressources héritées du passé que des personnes considèrent, par-delà le régime de propriété des biens, comme un reflet et une expression de leurs valeurs, croyances, savoirs et traditions en continuelle évolution. Cela inclut tous les aspects de l’environnement résultant de l’interaction dans le temps entre les personnes et les lieux ». Et la Nature, en tant que telle, n’en ferait pas partie ! À l’inverse des pratiques de l’homme affectant la Nature : agricoles, industrielles, forestières, … et qui sont de nature civilisationnelle, donc culturelle.

Mais avant d’aller plus loin, revenons aux définitions des termes de l’intitulé de cet éditorial.

La Nature (F. TERRASSON)[1], c’est ce qui existe en dehors de toute action de la part de l’Homme, ce qui ne dépend pas de notre volonté… Elle compte à la fois l’inerte (roches, sols, eau, …), les effets des processus « naturels » (orogénèse, volcanisme, phénomènes météorologiques : relief, climat, …) et le Vivant (autrement qualifié de Biodiversité).

Le Patrimoine, intuitivement, c’est un ensemble de biens dont on hérite ou qu’un titulaire (propriétaire, gestionnaire, …individuel, collectif, …, privé, public, …) transmet, dans le meilleur état possible, aux générations suivantes.

Selon H. OLLAGNON[2], « un patrimoine est un ensemble d’éléments matériels et immatériels qui concourent à maintenir et à développer l’identité et l’autonomie de son titulaire par adaptation dans le temps et dans l’espace à un univers évolutif ».

Quoi qu’il en soit, le patrimoine relatif à la Nature présente une singularité par rapport à un patrimoine immobilier, mobilier, artistique, …, puisqu’il est composé d’éléments difficilement appropriables, voire de res nullius (choses sans propriétaire) : les oiseaux, les mammifères sauvages, les papillons, les araignées, les poissons, l’eau, le vent, la pluie, n’ont à priori pas de « propriétaire » … Il est donc malaisé de lui trouver un titulaire susceptible de s’en occuper de manière à le transmettre en bon état aux générations suivantes ; et ce titulaire reste à inventer, en tout cas en Wallonie !

Est-ce cette difficulté qui écarte ainsi la Nature du Patrimoine ? La récente « Agence Wallonne du Patrimoine », sans autre précision cependant, se préoccupe-t-elle pour autant du patrimoine naturel ? Non ! On n’y imagine même pas que la Nature puisse faire partie du Patrimoine (avec un grand P). Certes il y a bien les sites « classés », dont certains comptent de nombreux éléments naturels mais qui alors ont aussi un statut (de protection ou non) relevant d’autres législations et qui sont gérés par d’autres administrations. Le patrimoine naturel est « géré » par une série d’administrations « verticales » qui s’occupent du sol ou du sous-sol géologique ou des forêts ou de l’eau ou de la Biodiversité ou du climat ou … Mais est-ce dans une optique « patrimoniale » ou simplement utilitaire ? Poser la question c’est y répondre …

On ne va pas parler cette fois de la Biodiversité : son érosion et sa marginalisation sont bien connues et souvent évoquées dans nos colonnes. Les objectifs politiques théoriques à son égard sont parfois ambitieux, intéressants, mais sans libération de moyens adéquats ! Ça ne peut donc pas marcher !

L’actualité évoque parfois la disparition des métaux précieux qui alimentent notre technologie actuelle ou la fin des gisements rocheux, du pétrole, …, mais aujourd’hui, nous examinerons plus particulièrement le cas des sols.

Le sol minéral et meuble (la « terre ») résulte, – au contact de l’atmosphère et des organismes vivants -, d’un très long processus de dégradation, physique, chimique, biologique, des roches qui constituent la croûte terrestre sous-jacente.

D’une manière très générale, le sol est le support de la vie terrestre et tout particulièrement des végétaux, notamment ceux qui contribuent à alimenter l’humanité : les bonnes terres ! Pour les céréales par exemple dans certaines régions (Hesbaye) ou l’élevage ailleurs via les prairies (Ardenne), … pour n’évoquer que la Wallonie. Mais est-on conscient de ce rôle vital de nos bons sols, par ailleurs riches eux-mêmes d’une imposante diversité biologique (invertébrés, champignons, « microbes », …) ?

On peut raisonnablement se poser la question, car depuis des décennies, au-delà d’une érosion naturelle importante (qu’on ne peut ou ne veut endiguer par des pratiques adéquates), ce sont des milliers d’hectares de « bons » sols agricoles wallons qui ont été soustraits à la production alimentaire. On pense à Louvain-La-Neuve évidemment (plus de 900 hectares), mais aussi aux différent(e)s mégalopitaux (en cours ou en projet), mégalopoles, mégalocontournements, mégalopistes d’atterrissage, mégaloterrains de foot, mégalozones d’activités économiques, etc., … Comme si on n’avait plus besoin à l’avenir de tous ces bons sols agricoles, partant du principe sans doute qu’il y aura toujours assez de terrains non bétonnés ailleurs, en Afrique, en Asie, en Amérique Latine, … là où on élimine, notamment, les forêts au profit des cultures agro-industrielles, pour nous alimenter en soja, en huile de palme, en sucre de canne …

Entre 1985 et 2017, 1620 hectares par an ont été artificialisés en moyenne en territoire wallon, principalement au détriment des terres agricoles, avec une perte de superficie de 56.700 hectares, soit moins 6,1% en 32 ans. Sur la même période, la superficie résidentielle est passée de 72.300 ha à 107.500 hectares, soit une expansion de 48,7 %…

Selon le dernier Rapport sur l’État de l’Environnement wallon, « la construction de bâtiments, d’infrastructures et d’équipements entraîne une artificialisation du territoire avec des conséquences environnementales multiples : perte de ressources naturelles et agricoles, imperméabilisation des sols, péri-urbanisation du cycle naturel de l’eau, fragmentation des habitats naturels… »

Certes, un projet de schéma wallon de développement territorial prévoit que, dès 2025, l’étalement urbain sur ces sols sera limité à 600 hectares par an. En 2050, il serait tout simplement interdit de grignoter du territoire pour construire : les « terres non artificialisées (toute surface retirée de son état naturel, forestier ou agricole) ne pourront plus être consommées », soit 0 hectares par an. Mais combien de milliers d’hectares supplémentaires disparaîtront encore d’ici là ?

Evidemment, quand le béton aura enseveli l’humanité, il restera les robots ! Mais en attendant…

Mais, « mieux vaut tard que jamais » et « il n’est jamais trop tard pour bien faire » diront les optimistes. Pour les pessimistes : on s’y prend bien trop tardivement !  « Le mal est fait ». Quant aux entreprises du secteur de la construction, elles font évidemment la grimace !

La Confédération de la Construction Wallonne prévient que « le “stop au béton” freinera exagérément toute possibilité d’urbanisation alors que la population augmente et que les besoins en espaces résidentiels et économiques restent considérables. Une raréfaction de l’offre de terrains entraînera une augmentation des prix, avec un nouveau recul de l’accès au logement des ménages ».

Elle dit aussi, et c’est sans doute plus intéressant, que « si on veut renforcer l’attrait et la qualité des zones bâties actuelles, il est essentiel d’accélérer les politiques de revitalisation urbaine et rurale, de stimuler la démolition-reconstruction des tissus vétustes, de restaurer le bâti historique, d’assainir les friches industrielles et d’amplifier la rénovation énergétique des logements et des bâtiments secondaires et tertiaires ».

On peut aussi, comme c’est le cas dans certaines villes françaises, reconstruire la ville sur la ville, valoriser les terrains sous-occupés, réutiliser des bâtiments, …

Il va donc falloir faire preuve d’imagination si on ne veut pas hypothéquer plus avant le patrimoine de nos sols.

[1] François TERRASSON :  « La peur de la nature » aux Éditions Sang de la Terre (1988), « La civilisation anti-nature» aux Éditions du Rocher (1994), « En finir avec la Nature » aux Éditions du Rocher (2002) et bien d’autres…

[2]  https://www.canal-u.tv/video/canal_uved/l_approche_patrimoniale_de_la_gestion_du_vivant.40121  – 2018.